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Le Grand Sud

« Gare de Pierre Bénite », je descends du train. Une bourrasque emporte mon chapeau. Je tremble de froid. Je m'étonne en pensant qu'à Lyon, à 5 minutes en train d'ici, je me baladais en débardeur. Mes lunettes de soleil ne me seront pas utiles. Je les range dans mon sac et sors mes mitaines.

 

 

J'avance sur le quai, encore souriant, heureux de découvrir le Grand Lyon, ambitieux de découvrir ce qui relit le sud, le nord, l'est et l'ouest de cette ville.

 

 

Je remonte dans les rues de Pierre Bénite. Je me rends vite compte que la banlieue lyonnaise du sud a son caractère. Elle est construite autour du Rhône et chaque ville semble une réponse à une usine chimique.

 

 

L'usine de Pierre-Bénite on la voit de partout, on dirait que la ville a été construite pour la regarder, comme si les habitants ne devaient pas l'oublier, même dans les heures les plus profondes de leurs sommeils. Et si par un heureux hasard s'ils ne la voyaient pas, une pancarte est toujours accrochée pour leur rappeler sa présence.

Les bruits des machines travaillant dans l'usine résonnent dans les ruelles de la ville. À chaque coin de rue les échos métalliques tambourinent dans mes tympans.

 

 

Je suis seul dans les rues, le peu d'humanité qu'il m'est donné de voir sont les affiches syndicalistes collées sur les murs et poteaux.

 

 

Je me balade en dessinant les traces de la ville n'appartenant pas à l'usine : pancarte de chien et niche de jardin. Je photographie au contraire les traces de la mélancolie : mur en béton, usine, rue désertée... et même une pancarte datant de la guerre froide.

Qui sont les gens qui ont accroché cette pancarte ? Qui à osé lutter contre les USA et l’URSS ? Qui a proposé « l'unité du peuple européen »?

Où sont les habitants de cette ville ? Sont-ils en train de mourir avec leurs usines ?

À la recherche de vie, je me dirige vers le centre-ville. Je me retrouve face à l’hôtel de ville, il inonde la place principale de rouge. Rouge vivifiant, rouge colérique, rouge politique.

 

 

De la rébellion, des usines, des maisons, des pancartes... mais toujours pas d'humains pour les animer. Je décide d’errer encore, la prochaine à gauche, puis à droite, droite, droite. Je me retrouve face à un mur de béton, il me surplombe de plusieurs mètres. Je ne peux pas voir ce qu'il cache. Mon esprit est titillé par ce mystère. Un mur si grand doit être à la hauteur de ce qu'il dissimule. Mon espérance se retrouve comblée, lorsque j’aperçois un trou dans le mur. Juste assez grand pour y glisser mon regard. Lorsque je découvre l'envers du décor ma surprise est grande, mes yeux s'écarquillent d'étonnement. Des milliers de jardins, à perte de vue. Des tomates, des salades, des choux-fleurs et des millions de légumes et de fruits, tous plus appétissants les uns que les autres. J’aperçois une multitude de couleurs qui chatouillent de plaisir mes rétines.

Un grincement se fait entendre, j’aperçois une botte, une robe avec des fleurs. L'eau coule de l'arrosoir sur les légumes, des gouttelettes glissent sur les feuilles des choux fleurs. Je retire mon regard. Je rougis de ma découverte, gêné d'avoir aperçu une beauté qui devait me rester caché.

 

 

Je reprends ma route dans cette ruelle de béton en sachant ce qui se cache derrière je souris. J'arrive à mon arrêt. Le bus ne se fait pas attendre, je monte. Une fois assis, je regarde chaque maison en béton. Chacun de leurs propriétaires dissimule dans le profond de la ville un merveilleux jardin.

 

 

Le bus traverse l'Autoroute du soleil pour revenir dans le centre de Lyon.

 

 

 

 

 

 

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